La lande était un magnifique lieu d’inspiration pour Nuage de Citrouille. Dès qu’elle entrait en ces lieux, elle ressentait aussitôt une chaleur peut-être divine la toucher. Citrouille aimait bien cet endroit ces temps-ci, surtout parce qu’il était loin des fantômes du clan. Même si les autres chats parlaient du fait que ce soit des anciens, elle n’aimait pas beaucoup l’ambiance que cela donnait sur tout le clan. La jeune chatte était venue se ressourcer pour penser à ces évènements…

Doucement, ses petites pattes touchèrent le sol rocailleux des landes. Des fleurs… Il commençait à en avoir ! Le printemps était arrivé et les odeurs tourbillonnaient autour de Nuage de Citrouille. Elle s’avança dans un fourré d’herbes sèches de l’automne dernier. Elle s’asseyait puis leva son doux visage vers le ciel. Ses doux yeux bleus se refermèrent pour bien apprécier le moment.

« Renseignez-moi… Qui sont-ils?... Nous veulent-ils du mal? »

Une bourrasque de vent frais la frappa de plein fouet auquel elle ouvrit instantanément les yeux. Ses pupilles s’agrandirent. Un murmure… Plusieurs voix… Une voix se distinguait… Ses yeux se refermèrent et son corps tomba dans le fourré. Une vision.
Elle voyait les fantômes. Ils étaient là, tous ensembles. Ils avaient l’air… vivant ? Ensemble, ils discutaient et semblaient être sérieux à propos de quelque chose. Même si Nuage de Citrouille se concentrait, elle ne pouvait distinguer clairement leurs propos. L’Heure avait cependant l’air grave. La vision devint floue puis une autre scène apparut devant ses yeux… Les anciens étaient maintenant des êtres fantomatiques, comme dans le présent. Elle reconnaissait les reines qui couvaient avec peur leurs chatons. Mais les anciens étaient là et ne bougeait pas.

Soudain, Citrouille ressentit son cœur se fendre. En regardant les anciens, elle ressentait une culpabilité provenant d’eux. Une grande tristesse. Un amour inconditionnel. Peut-être… ont-ils un message à transmettre?

« Heho ? Réveille toi , t'es toute bizarre ! »
Nuage de Citrouille ouvrit doucement ses yeux. La brume de sa vision se mit à disparaître pour qu’elle puisse distinguer un visage devant elle. De grands yeux verts… Un pelage argenté qui brillait au gré du soleil… Qui? Pourquoi? Citrouille avait un peu de mal à replacer ses idées après une vision. Elle se leva avec douceur et regagna sa position assise. Elle sourit au chat devant elle.

« Ne t’inquiète pas, c’est parfaitement normal. »

Citrouille leva les yeux sur le ciel qui maintenant avait tourné dans un gris beaucoup plus terne que le pelage du jeune chat se tenant devant elle.

« Il va pleuvoir… Tu devrais retourner dans ta tanière… », Dit-elle avec une voix sereine et douce

Citrouille, elle? Elle resterait encore un peu pour se remettre de ses idées. Que voulait-donc dire cette vision… La petite chatte fronça des sourcils en se perdant dans ses pensées. Les fantômes ne seraient donc pas mauvais? Sa queue balayait nerveusement le sol rocailleux. Bien que Nuage de Citrouille soit asociale, elle ne dédaignait pas la présence d’autrui. C’est pourquoi elle ne bougea pas de son emplacement, près du jeune chat mâle. Ses pensées se retournèrent vers lui.
Nuage Vertueux. Un peu plus jeune que Citrouille. Âgée d’environ 3 lunes lors de sa naissance, la petite avait entendue parler vaguement d’un petit qui était né en entrainait la mort de sa mère et sa sœur. Tout le monde était en émoi et tout bougeait beaucoup dans la pouponnière. Maintenant qu’il était un apprenti, Petite Vertu, devenu Nuage Vertueux, était droit et travaillant. Il avait l’air sympathique malgré son petit air autoritaire. Il avait des amis et jouait le rôle de chef. Il dirigeait et savait parfaitement ce qu’il en était. Il parlait souvent très fort de son clan et à quel point il était le meilleur. Par-contre… Lors de batailles, le pauvre petit était lâche et se cachait. Citrouille pensait le comprendre. Elle aurait voulue être une femelle comme lui, peut-être la lâcheté en moins ! Mais bon, elle était très bien seule aussi. Après tout, elle vivrait peut-être le même destin que sa mère…

« J’aime la pluie. C’est mouillé. Et ça lave. »
Nuage de Citrouille se retourna abasourdie par sa réponse. Elle garda le silence pour finalement éclater de rire. Un doux rire qui réchauffait la lande. Jamais à sa connaissance, la petite n’avait ri. Jamais à sa connaissance quelqu’un ne lui adressait la parole simplement pour le plaisir. À cette pensée, Citrouille se tut. Avait-elle le droit de rire? Après tout ce qu’elle avait causé à sa mère, avait-elle le droit?
Nuage de Citrouille allait dire quelque chose quand le jeune mâle la coupa.
« Ton pelage. »
La femelle se dressa sur ses pattes et se crispa. Allait-elle connaître la violence verbale entre chats? N’étais-ce pas un truc de chatons? Que devait-elle faire? Partir? Partir. Partir…
« Il est beau. »
Citrouille sentit tous les muscles de son corps se détendre. Elle s’approcha doucement de Nuage Vertueux.
« Merci… », Murmura-t-elle en souriant
Elle fit aller sa queue puis leva de nouveau le visage vers le ciel de plus en plus gris.
« Est-tu venu pour quelque chose en particulier? »
Elle abaissa de nouveau son visage et promena son visage sur la lande qui s’obscurcissait à vue d’œil. Elle remarqua alors de belles fleurs comestibles. Elle sourit et gambada jusqu’aux dites fleurs. Avec ses petites dents, elle détacha la tige de leurs racines et put ainsi récolter quelques végétaux dans sa gueule. Elle devait en profiter étant donné qu’elle n’aurait pas de si belles occasions de ne pas manger de viande. Elle revint près de Nuage Vertueux et déposa les fleurs à ses pieds.
« Tu aimes? », dit-elle avec un sourire, bien consciente que peu de gens mangeait ces choses.
Elle, par-contre, les adorait. Que dis-je… En raffolait! Il était un peu idiot pour elle de rester alors que la pluie allait bientôt tomber mais elle se sentait confortable auprès du mâle. Enfin quelqu’un lui adressait la parole…

La femelle sembla surprise par son commentaire sur la pluie. Y'avait quoi ? Je lui jetai un léger regard interrogatif face à son visage éberlué, puis sursautai quand elle commença à rire à Gorge déployée. Qu'avait-il de drôle ? Je repensais en silence à ma phrase et pouffai en rejoignant mon rire aux siens. Ce que j'avais l'air bête ! Ma phrase était, disons, idiote. Je m'arrêtais de rire après que j'aille vider mon stock d'air et reprit mon souffle, les côtes en feux. Ce que je pouvais être drôle des fois ! Et de plus , cette phrase m'avait eu l'air tout a fait normal. Cependant, quand je prononçai ma deuxième phrase je semblai la voir se crisper. L'avais-je blessé avec des propos ? Néanmoins, elle se radoucit et me sourit. Ouf ! Je la détaillais de mon regard vert pâle, content qu'elle ne soit pas fâchée. Elle était sympathique et je ne méritais pas de m'attirer ces foudres ! J'aimais beaucoup mieux me faire des amies. C'était plus simple, et moi dangereux que de s'accumuler une tonne de personne qui te déteste. Bref, revenons à ce que j'étais en train de penser avant...

Merci…

Murmura Nuage de citrouille, un joli sourire planant sur ses babines rosées. Je lui rendis celui-ci et remuai ma queue en la voyant levée sa tête vers le haut. Pensait elle qu'il fallait mieux rentrer maintenant ? Je n'allais pas la laisser tout de seul quand même! Si je devais partir, elle m'accompagnait.

Es-tu venu pour quelque chose en particulier?

Je lui souriais distraitement. Bonne question. Je pourrais peut-être répondre "Le destin m'a mené ici !" Mais euh, son fait trop dramatique. J'allais donc lui répondre quand elle passa sous mon nez comme une flèche en gambadant. Mes yeux la suivirent de loin et s'écarquillent quand je vis ce qu'elle faisait. Pourquoi elle arrachait des fleurs ? C'est une apprentie guerrière, pas guérisseuse ! Ma surprise fut encore plus grande quand elle revint me les poser devant moi ne souriant. Euhm... Hésitant, je regardai la fleur puis la femelle en haussant légèrement mes sourcils. Qu'est-ce qu'elle voulait que je fasse ?

Tu aimes?

Si j'aime ? Elle veut que je goûte à des... Des plantes ? Mon cœur fit trois tours et la bile me monta à la gorge. Wouark ! Je la fixai d'un coup et lui soufflai en grimaçant légèrement :

Tu veux que je goûte ? Pourquoi ne pas chasser pas à la place ?

Je soupirai doucement et reposai mon regard sur les fleurs. Seulement pour être poli, je m'abaissai pour renifler la plante verte et rose. L'odeur était enivrante ! Oh, et puis... Je la mis dans ma bouche d'un coup et mâchais lourdement. Le goût était léger, doux. Ce n'était pas si pire ! Disons que la viande était bien mieux, mais se pourrait passer. Je pourrais m'habituer peut-être... Je relevai ma tête pour croiser les yeux de la femelle, et lui dit :

Hum... Disons que ce n'est pas si mauvais. Maintenant, je peux te faire goûter à de la viande.

Je lui fis un signe de queue pour lui montrer que je revenais et plongeai vers l'endroit ou j'étais il y a quelques minutes. J'avais entêté une souris maladroite que j'avais pu attraper. Je revins en courant, manquant de trébucher plus d'une fois. Mais j'avais envie de lui faire goûter ! Si elle ne l'avait déjà pas fait. Mais j'avais déjà entendu qu'elle n'aimait pas chasser ni se battre... Une Pacifique. Elle aurait dû être apprentie guérisseuse ! Je dérapais devant elle et, lâchant la souris, lui dit :

Voilà ! C'est une souris.

Je pris une pause et lui dis en haussant mon sourcil droit :

C'est gris, des souris.

Surprise, Nuage de Citrouille vit de ses propres yeux Nuage Vertueux avaler la plante. Elle sourit et attendit ses commentaires. De où elle se trouvait, c’est-à-dire très près du mâle, elle pouvait sentir l’odeur enivrante de cette plante. Le goût sucré mais léger… Voyant qu’il mâchait sa fleur, elle s’abaissa pour en prendre une autre. Elle mâchouilla la tige puis le meilleur, les pétales, atteint ses papilles gustatives. Pour Citrouille, une explosion de saveur venait tout juste de cette petite plante. Elle sourit et se mit à ronronner, contente de son délice. Elle sentit que son camarade le regardait.
Citrouille leva la tête, mâchouillant les pétales de sa fleur.

« Hum… Disons que ce n’est pas si mauvais. Maintenant, je peux te faire goûter à la viande. »

La femelle écarquilla des yeux et secoua la tête en panique. Elle avala sa fleur et dit :

« Non ! Ne t’inquiète pas, j’ai… »

Inutile d’en dire plus. Nuage Vertueux a plongé dans un bosquet non loin de là.

« …déjà mangée de la viande », termina-t-elle dans un murmure.

Elle vit le jeune mâle revenir en courant, avec beaucoup de maladresse, mais quand même. Il relâcha une souris tâchetée devant elle. Morte. Citrouille recula de dégoùt. Elle secoua une fois de plus la tête. Pauvre petite souris…

« Voila! C’est une souris ! »

Citrouille fit un sourire malaisé.

« Oui… J’ai bien vue… »

Elle s’avança et observa de plus près la souris. Elle n’avait pas l’air de souffrir. Elle avait simplement l’air de dormir. Si on met de côté les marques de sang sur son corps. Elle souleva sa patte droite et toucha du bout du doigt la souris. Elle était molle. Douce. Elle soupira.

« C’est gris, des souris. »

Citrouille leva son petit visage déconfit et le regarda intensément. Pas de méchancetés, mais plutôt de tristesse.

« Oui… J’ai bien vu… »

Je lui sortis un adorable sourire et attendis qu'elle la goute. Elle ne réagissait pas, regardant avec malaise l'animal étendu sur le sol. Qu'avait-il ? Je m'approchai d'elle pour le mettre côte à côte , et regardai la bête pour essayer de comprendre ce qu'elle avait. Une patte de travers ? Une queue arrachée ? Rien de sa, pourquoi n'hésitait elle ? Je me reculai d'un pas après avoir dit ma phrase et la fixai intensément. La jeune femelle leva son visage vers moi, et je pus lire une infinie tristesse. Inquiété, j'ouvris ma bouche comme un poisson pour ensuite la fermer, puis la questionnai d'un regard par tellement sûr. J'essayais de me rappeler des choses sur elle ... Elle mange des plantes, n'aime pas tellement chasser ni combattre, aurait voulu être une guérisseuse, et veux que tout le monde soit en paix. Ébahis, je lui sors en tirant légèrement la langue sans faire par exprès :

T..tu ne manges pas de viande ? Juste ces petites plantes roses là-bas ?!

Je frissonne légèrement et reprends mon calme. Plus de blague, elle est réellement troublée ! Je prends délicatement la souris dans ma gueule et la pose derrière un buisson. Caché de sa vue cela va mieux. J'amènerais la bête au camp plus tard. Je reviens en trottinant habilement vers elle et m'assis en la fixant droit dans les yeux. De ma parole la plus honnête, je lui dis :

Je suis vraiment désolé, je ne savais pas que tu étais aussi... Euh... Comment dire ? Pacifique ? En gros vraiment désolé.

Gêné, je me trémoussai en grattant la terre de ma griffe. Je n'espérais pas que notre début d'amitié aller se briser à cause d'une simple souris !