Un long soupir. Un souffle court. Et la Dame se retrouvait en terres libres.
S'éclipsant en dehors de son camp, la tricolore n'avait pu réprimer un grognement en voyant la montée qu'elle s'apprêtait à gravir. Pourquoi s'infligeait-elle cela, déjà ? Pour mettre le plus de distance entre le Clan de l'Ombre et elle, certainement. Elle avait besoin de réfléchir, et être entourée des chats qu'elle apprécie ne l'aidait pas à être objective. Nuage de la Lubie, Patte des Limbes, Gloire de l'Ipomée, Étoile Candide... trop de félins qu'elle aimait - pour les deux premiers - et qu'elle respectait - pour les deux restants -, ternissant son jugement de bien trop loin. Alors, aussi longtemps que son ventre rond lui permettrait, elle marcherait pour s'éloigner de cette vie active qu'elle s'apprêtait peut-être à quitter.

Les petits s'agitaient en elle. Combien y en avait-il ? Plusieurs, c'était certain - et quelques uns avaient dû prendre le tempérament de feu de leur mère. Il lui semblait qu'ils n'arrivaient plus à attendre, qu'ils voulaient entrer dans ce monde bien trop sale pour leurs petites pattes candides. Le poids qu'ils imposaient à leur mère la contraint à faire une pause dans sa longue cavalcade : elle avait marché pendant plus de trois heures, déjà !

Une odeur âcre vint lui titiller les narines. La reine fronça le museau sur une mine pleine de dégoût. Beurk ! Ces Bipèdes empestaient vraiment. Elle était bien contente de n'avoir affaire à aucun d'entre-eux, et ne souhaiterait jamais cela à ses petits. Le nez occupé, elle ne sentit pas arriver la femelle tigrée/mouchetée qui fit bruire les buissons avant de sortir de sa cachette d'un pas calme, pacifique. Elle ne sentait aucun Clan, et son regard n'était pas haineux. La Dame n'avait aucune raison d'attaquer : pleine, fatiguée et en terres libres, elle devait plutôt être sur le territoire de la solitaire qu'elle sur le sien. La tigrée se portait plutôt bien : le poil lustré, le ventre dodu, elle avait l'air de bien se nourrir. La Dame qui songeait à devenir comme elle, se projeta devant cette chatte inconnue : deviendrait-elle ainsi, elle aussi ? Cela ne semblait pas si dur que ça. Peut-être que cette femelle pourrait lui en apprendre un peu plus ? Dame Allégorie s'assit et ses moustaches frétillèrent en signe de pacifisme. La chatte dut comprendre qu'elle était inoffensive - du moins, avec elle - puisqu'elle se détendit elle aussi.

« Qui es-tu ? commença la reine, douce. Je viens en paix. Enfin, à vrai dire, je ne viens pas vraiment : tu étais sur mon chemin. Mais je vais en profiter pour faire une pause. »

En dépit de ses bonnes manières habituelles, la Dame s'affala sur le sol en poussant un long soupir, épuisée. Ses pattes étaient endolories et il y avait beaucoup d'activité en elle. Ils ne semblaient pas avoir sommeil. Ah, mes petits. Ce que vous me faites déjà endurer, déclara t-elle intérieurement, un regard empli d'amour posé sur sa future progéniture. Elle n'en pensait pas un mot : ces chatons allaient être la plus belle chose qui lui soit jamais arrivée.

Cette femelle était élancée sur de grandes pattes fines, elle se portait bien mais son ventre gémissait, et pas de la même manière que celui de la Dame. Le sien n'abritait personne, il avait seulement... faim. Si c'était cela, la guerrière, elle, mourrait de faim à chaque seconde de la journée et de la nuit. Elle ne pensait pas pouvoir un jour atteindre ce stade de famine, alors qu'elle mangeait très bien pour une femelle de son âge. La Dame pouvait facilement deviner que c'était à mettre sur le compte de sa grossesse, mais elle s'inquiétait un minimum quant à sa ligne : très jolie sans réellement en avoir conscience, la tricolore aimait prendre soin d'elle. Ses longues parties de chasse ne lui servaient pas qu'à conserver le bien-portant de son Clan. Elle appréciait de courir, de se démener en pensant à ces calories qui quittaient son corps. Aujourd'hui, elle n'avait pas réellement conscience du nombre de kilos que ses petits lui avaient ajouté, et elle ne savait pas non plus si cela allait rester après sa mise bas. Une grossesse changeait toujours une femelle, que ce soit physiquement comme mentalement. Pour la Dame, ce sera les deux.

« Que fait une chatte portante seule, si près des Hommes ? »

Si elle en doutait peu avant, Dame Allégorie était maintenant certaine du statut de solitaire de la tigrée devant elle. L'odeur ne trompait pas, mais les paroles non plus : aucun chat clanique ne s'adonnait à appeler les Bipèdes de la sorte. Sans relever ce petit ton jeunot que la chatte avait adopté, ou plutôt en l'ignorant, la reine répondit d'une voix posée, dénuée de toute agressivité :

« Je n'en suis pas sûre non plus, à vrai dire. Je te répondrais pour réfléchir à certaines choses, sans grande conviction. Et toi ? Tu m'as l'air jeune. »

À vrai dire, elles n'avaient que quelques lunes d'écart.

Une extrême bonté pouvait se lire sur le visage de la solitaire pour ceux qui voulaient bien la voir. Du moins, elle semblait candide, peu sûre d'elle, de l'amabilité qu'on ne possédait plus au delà de six lunes. Elle semblait encore jeune enfant, pourtant son physique venait troubler cette idée de chatonne. Quel âge avait donc cette chatte ? Sans plus attendre, comme lisant dans ses pensées, cette dernière reprit la parole de sa voix fluette, suintant la joie de vivre :

« J'ai deux ans et quelques mois de plus... Je ne veux pas paraître trop curieuse, mais d'où tu viens toi ? »

Le vocabulaire de la tigrée était loin de ressembler à celui qu'employait la reine, mais cela ne lui importait peu. La différence était une qualité à ses yeux, et cette idée était très rediscutée. Rapidement, la Dame fit le calcul. Cela s'approchait des vingt-cinq lunes, si elle ne se trompait pas. La solitaire n'avait que la moitié de l'âge de la tricolore ! C'était difficile à réaliser, puisqu'elle faisait plus jeune encore. Un instant, des branches craquèrent au loin, et une puanteur vint s'imposer aux sensibles narines de la Dame : un Bipède ! Elle put voir sa tête remplie de poils dépasser d'un grand fourré, et réalisa qu'elles étaient beaucoup trop près. Se levant difficilement, elle indiqua à la petite femelle un arbre un peu plus loin d'un signe de queue, et le rejoignit aussitôt. Que ses petits étaient lourds ! Combien étaient-ils ? L'ombreuse devait se poser cette question pas moins de cinq fois par jour. Après s'être essoufflée lamentablement par ce simple effort - la marche précédente avait été bien longue -, elle repensa à la question posée et se contenta d'y répondre.

« Je viens du Clan de l'Ombre, je pense que tu en as déjà entendu parler. Elle se lécha énergiquement le poitrail avant de se coucher de nouveau, invitant sa cadette à faire de même d'un simple signe de tête. Puis-je savoir ton prénom ? Je suis Dame Allégorie. J'attends des petits. »

Le détail sautait aux yeux, mais la femelle s'était dit que désormais elle se devait de se présenter sous ce jour-là. Car l'événement changerait sa vie à jamais... et il était proche.

Cette chatte, elle semblait portée par l'innocence candide de l'enfance. Peut-être avait-elle grandi en souhaitant y rester ? Tant mieux pour elle, c'est même mieux ainsi. Parfois, on n'a pas vraiment le choix, contraints à devenir adulte tôt ou tard, un événement marquant qui vous arrache à votre pouponnière de façon précoce. C'était ce qui était arrivé à la Dame. Une ombre passa dans son regard, puis elle se ressaisit bien vite : elle ne voudrait pas que la tricolore s'apitoie sur son sort. Elle est sûrement en train de la regarder de là-haut, où elle était.

« Masha. Je m'appelle Masha. Les terres de ton Clan sont loin... Pourquoi prendre des risques alors que tu attends la vie ? »

Étrangement, cette remarque fit plus de bien à la Dame qu'elle aurait pu l'imaginer. Une autre se serait vexée... l'ancienne elle se serait vexée. Mais la voilà aujourd'hui, qui portait un ventre rond visible de chacun. On pouvait désormais déduire d'un regard que la tricolore attendait un heureux événement, que bientôt elle serait prête à élever quelqu'un d'autre qu'elle-même. Ses pensées la portèrent loin, quelques instants. Loin de cet endroit, loin de son Clan, loin de Cerfblanc. Très bientôt ses petits seraient là, c'était désormais un futur proche et non plus quelque chose de conditionnel. Pourquoi avait-elle considéré cela comme une mauvaise nouvelle, en premier lieu ? Parce qu'un code avait décidé qu'un amour ne pouvait pas avoir une patte dans chaque frontière ? Qu'est-ce que ça changeait au final, si son cœur allait à quelqu'un d'autre que le Clan de l'Ombre, un solitaire en plus de cela, un sans-parti inoffensif pour la sécurité de la tribu ? Une ombre traversa le regard azur de la guerrière. Elle était en train de prendre une décision qui changerait sa vie à jamais...

« Ne portent-ils donc que si peu d'importance au sang de votre sang, là d'où vous venez, Dame de l'Ombre ? »

La Dame revint à elle, quittant la bulle qu'elle s'était formée en quelques secondes pour y réfléchir, précédemment. La question de l'enfant était des plus intéressantes. Généralement, c'était de cela qu'avait besoin une personne indécise : la sincérité de la jeunesse, celle qui met les formes de côté pour poser les questions sous leur vrai jour. La reine se mit à sourire, se rendant peu à peu compte. Ladite Masha avait raison. À quoi bon rester quelque part où ses chatons, êtres vivants innocents, seraient catalogués jusqu'à la fin de leurs jours si on venait à apprendre leurs origines ? La réponse était simple : aucune raison. Elle n'avait plus aucune raison pour s'entêter à rester là-bas. Elle devrait en parler à Patte des Limbes avant de partir, elle qui s'était attachée au chaton. Son choix était fait.

Ayant répondu au creux de son esprit, Dame Allégorie en oublia que la petite Masha demandait à être éclaircie, à comprendre ce système obsolète de sang-mêlés et de code du guerrier. Elle était la preuve vivante qu'au naturel, un chat n'avait pas besoin d'étiquette pour vivre, qu'il était tellement mieux sans. La reine tourna lentement la tête vers la petite femelle, les yeux doux et le sourire aux babines, et lui répondit par une autre question, sans vraiment y faire attention.

« Dis-moi, Masha. Voudrais-tu connaître mes petits à la naissance ? Je te vois seule, et tu sembles apprécier ma compagnie. Ne serais-tu pas mieux portante si nous organisions des visites quotidiennes ? »

Sa proposition pris du sens en même temps qu'elle la prononçait. Alors, là étaient les faits : elle allait réellement s'exiler du Clan de l'Ombre, mais ce par choix et non pas par obligation. Elle resterait noble et libre, et ce sous son propre commandement. Les regrets seraient moindres. De toute façon, elle trouverait quand même le moyen de rester éloignée de Dunkan, elle lui ferait croire qu'elle reste au sein de la tribu. Bien que ses sentiments pour lui soient totalement intacts, une haine et une peur sans merci s'étaient installées dans son esprit vis à vis du noiraud, et cela semblait irréversible. Masha, elle, semblait d'une douceur infinie : la Dame l'appréciait déjà beaucoup. Où étaient ses parents ? Elle pourrait en remplir le rôle sans aucun problème, si ça n'en tenait qu'à son désir.

Une expression douteuse vint s'installer sur le visage enfantin de la tigrée. Ce qu'avait remarqué la Dame et qui était agréable chez la petite, c'était qu'elle ne jouait aucun jeu. Elle ressentait quelque chose, elle le montrait, et ne le faisait pas volontairement : c'était juste quelque chose de naturel. Elle ne se cachait derrière aucun masque, aucune excuse, elle était juste elle-même. Masha, en plus de son adorable prénom, se trouvait être une personne très pure. La question directe qu'elle posa donc par la suite ne contenait ni artifices, ni atténuant. Elle y allait comme elle le sentait, et rien de plus.

« Comment pourrais-je passer vos frontières ? Et puis, je crains les Clans. Parfois gentils, parfois non. C'est une mauvaise idée... »

Mais que la Dame avait pu se montrer stupide ! Faire une telle proposition sans préciser qu'elle allait quitter l'univers des Clans, quelle idiotie ! Masha semblait effrayée à cette idée. La belle tricolore s'en voulut un peu, et elle se promis de mieux lui expliquer lorsque la petite aurait terminé. Parce que sur le ton qu'elle avait employé, on pouvait comprendre qu'elle n'avait pas fini sa phrase.

« Où est leur père ? Est-il de votre Clan aussi ? Ou d'un autre..? C'est pour ça que vous êtes si loin de chez vous ? Vous avez unifié deux Clans sans leur accord, c'est ça ? »

Vu l'expression inquiète que pris la tigrée par la suite, la conclusion était vite faisable : elle appréhendait la réaction de la Dame. Allait-elle s'en aller, énervée ? Lui reprocher son indiscrétion ? Lui lancer des coups de patte pour lui faire comprendre que ce n'était pas bien élevé de sa part ? Rien de tout cela. Un immense sourire vint élever les babines de la reine. Voilà ce qu'elle aimait : la sincérité enfantine. Lla petite avait raison dans le fond, mais cela était plus compliqué. Se sentant poussée par une force inconnue peut-être provenue de l'affection qu'elle acquérais pour cette petite féline, la Dame voulut se confier, lui expliquer l'histoire. Elle n'attendit qu'une petite seconde avant de s'y mettre.

« Excuse-moi, je t'ai mal présenté la situation. Rappelle-toi, je t'ai parlé de m'être aventurée si loin pour réfléchir. Eh bien, c'était pour prendre la décision que tu m'as aidée à prendre : je vais quitter mon Clan. »

Dame Allégorie fit une pause. Une de ses crampes journalières vint l'interrompre. Fermant les yeux, elle laissa passer la douleur sans dire un mot, habitude faisant. Après que cela soit passé, elle reprit, un sourire doux adressé à la tigrée.

« C'était donc dans cette mesure que je te proposais de venir nous voir quelques fois, mes petits et moi. Nous ne serions enchaînés par aucun Clan, tu n'aurais pas à t'en faire. Et tu as raison, leur père n'est pas du Clan de l'Ombre. Il est comme toi, libre, indépendant et solitaire. »

Elle laissa son récit sonner dans l'esprit de la tigrée, toujours ce regard maternel posé sur son corps élancé.

Masha afficha un grand sourire enfantin. Elle semblait si heureuse à l'annonce de la guerrière ! Ça se voyait que son passé avait été compliqué. Bien évidemment que la Dame avait remarqué son retard. En quoi cela était-ce censé changer ce qu'elle pensait de la tigrée ? On était qui on était. Et puis, elle n'était pas très bien placée pour juger...

L'expression de la solitaire se figea pour se transformer en une inquiétude curieuse. La Dame se demanda quelle question elle pouvait encore avoir sous la patte. Mais elle ne dit rien, attendant que Masha s'exprime d'elle-même, patientant calmement jusqu'à ce que ce soit son tour.

« Et comment allez-vous réussir à partir de votre Clan ? Ne sont-ils pas attachés à vous ? Vous laisseraient-ils partir ainsi ? »

La Dame se figea elle aussi, soudain soucieuse. La petite marquait un point. Jusque là, elle était trop occupée à se décider à partir ou non, à peser le pour et le contre, et cette rencontre l'avait aidée à faire son choix. Mais elle n'en était pas encore venue à penser à comment elle pourrait bien se débrouiller. Peut-être confierait-elle son choix à Songe Idyllique, lui qui lui avait annoncé la bonne nouvelle, sans la juger ? Il se contenterait de le dire aux autres, ou de la faire passer pour morte. De toute façon, pas grand monde ne tenait à elle dans ce Clan de voraces. Il y avait peut-être ce grand mâle gris qui n'arrêtait pas de la regarder sans raison et qui commençait particulièrement à l'agacer. Comment s'appelait-il déjà ? Ah oui, Chants d'Orphée.

La reine se redressa un peu et toute inquiétude quitta son visage. Apaisée, elle savait quoi répondre à la petite.

« Ne t'en fais pas pour ça, c'est mon problème, commença t-elle avec toute la douceur du monde. Tu ne m'as toujours pas répondu. Je me ferais une joie de te compter comme membre de ma famille. »

Rien de plus. Elle posa ses pupilles azur sur les grandes billes bleu/vert de la mignonne sans lui mettre la pression. Elle attendait patiemment, rien de plus.

Le visage de la tigrée se teintait d'excitation, puis de doutes. Elle semblait éprouver une joie timide, comme si elle attendait l'autorisation d'être heureuse. Peut-être avait-elle peur de se faire de fausses joies, d'être déçue par la suite ? Jamais avec la Dame. C'était étrange, mais elle avait directement senti cet étroit lien qui les rapprochait, comme si le Clan des Étoiles avait voulu que cela se passe. La belle tricolore décida de ne point mentionner cette impression, ne connaissant pas les croyances de la solitaire et la foi qu'elle portait - ou non - en ces dernières.

« Mais... Vous ne me connaissez pas. Moi non plus d'ailleurs, comment vous faire confiance ? Et puis il est déjà risqué de se mettre un chat de Clan à dos, alors un Clan entier ? Comment vous allez vous débrouiller ? »

La petite n'avait pas tort, et visiblement ce n'était pas la première fois dans cette conversation. Sans s'en rendre compte, elle était d'une grande aide à la calico : réaliste, elle ne savait pourtant rien de la vie de solitaire, et peut-être s'était-elle fait les idées qu'elle voulait bien se faire quant à ce train train quotidien. Mais à cette question, Dame Allégorie savait exactement ce qu'elle allait répondre, comme si c'était inné. Elle afficha un de ses grands sourires paternels avant de poser ses billes azur sur le tigre de son pelage avant d'annoncer, douce :

« Fais-moi confiance, je sais reconnaître les grands cœurs, et le tien est immense, Masha. N'en doute jamais. Pour ce qui est de mon Clan, c'est mon problème : soit ils acceptent et respectent ma décision, soit ils m'en veulent et cela ne me gênera pas plus que ça. Les Clans se battent entre-eux, mais ne sont pas les plus grands des sauvages. Ils ne s'attaqueront jamais à quelqu'un qui a fait un choix de lui-même, une reine en plus de ça, et encore moins si ce quelqu'un se trouve être une ancienne camarade de tanière. »

Pour une fois, elle ne tentait pas de se rassurer elle-même en annonçant cela. C'était réellement pour convaincre Masha, pour lui demander de partir avec elle. Elle voulait lui redonner confiance, car cette frêle créature semblait penser qu'elle n'avait rien à faire en ce monde. La Dame lui prouverait le contraire. Elle baissa les yeux sur son ventre avant de se replacer sur un de ses flancs, pour laisser vaquer ses petits qui, jusque là, étaient quelque peu opprimés sur le sol chaud. Les rayons du soleil vinrent éblouir les parties claires du pelage de la reine et elle annonça, relevant le regard vers sa nouvelle protégée.

« Maintenant, Masha, il me faut une réponse. Elle savait très bien que ce n'était pas quelque chose à prendre à la légère, et comprenait l'hésitation ainsi que les questionnements de la petite. Elle ne souhaitait donc en aucun cas la presser. Et puis, sans se le dire, il s'agissait faune réelle adoption, ce qu'elle effectuait ici. Mais ne pense pas avoir à te précipiter. Je reviendrai dans trois jours au coucher du soleil, quand les arbres recouvrirons la plus grande partie de ses rayons. Je referais le chemin jusqu'ici. Et sache que quoi que soit le choix que tu feras, ce sera le bon, et je ne t'en tiendrai jamais rigueur. »

La reine attendait une réponse de la femelle, quelque chose qui lui fasse comprendre qu'elle avait bien tout compris.