Same symptoms || SOINS de Petit Corbeau
Pétale d'Asphodèle

La pouponnière n'était pas un lieu chéri pour Pétale d'Asphodèle. Alors que tout le Clan appréciait l'abri comme une parenthèse douce, heureuse et nostalgique, le matou chocolat ne pouvait la voir que comme un endroit terne et étriqué. Si un jour lorsqu'il était enfant, cela lui avait paru le lieux le plus merveilleux du monde, cette période était révolue depuis l'instant ou il avait été interné avec le guérisseur alors même qu'il allait devenir apprenti.
De plus, chaque fois qu'il pénétrait dans la pouponnière, il sentait les regards lourds de sens des reines qui le regardaient s'approcher de Passion Erratique et des chatons nouveaux-nés, ses supposés petits. Et, si les jugements étaient un supplices, devoir ignorer l'affection de ses enfants adoptés était un déchirement. Puisque le Clan doutait de lui suite à cette "trahison" qu'il n'avait pas commise, il ne pouvait profiter de la compagnie des enfants.

Cependant, un détail encore plus inquiétant gisait dans la pouponnière. Un chaton était pris d'un mal soudain. Si, les premiers jours, il n'avait  eu que quelques fièvres et toux qui s'apparentaient aux simples effets de l'hiver, l'état de l'enfant nommé Petit Corbeau n'avait fait qu'empirer malgré la médecine douce administrée par Pétale d'Asphodèle, qui avait du demander la repousse de son baptême d'apprenti. Aujourd'hui, il revenait donc constater l'état du petit, espérant de tout son cœur que sa fièvre aurait un peu baissée. Mais lorsqu'il s'approcha du nid de mousse du chaton, déjà bien grand pour une si petite tanière, il pu voir d'un coup d’œil que ça n'allait pas mieux du tout. Pelotonné contre sa mère Pelage de Brume, le chaton noir avait la respiration difficile et sifflante. Lorsque le guérisseur effleura sa tête du bout du museau, il sentit que la fièvre ne décroissait pas.
Pétale d'Asphodèle allait devoir agir activement, désormais. Il était possible que Petit Corbeau n'ait pas qu'un simple rhume : à ce stade là, ce mal pourrait tout aussi bien être le mal vert. Il allait devoir transporter l'enfant jusqu'à la tanière de soins : la pouponnière était bien trop chaude et bruyante pour le malade, et on ne pouvait risquer de contaminer les reines et les chatons. Le guérisseur fit part de l'état de son fils à Pelage de Brume. La pauvre mère le laissa prendre sa progéniture, la caressant d'un regard triste. Songeur se sentit soudain un peu coupable de ne pas avoir pu traiter efficacement le petit plus tôt, alors il promit à la reine de le lui ramener en pleine forme. Oui, c'était sûr : l'enfant irait mieux. Déterminé, le guérisseur attrapa Petit Corbeau entre ses crocs, qui lâcha un faible miaulement en se sentant décoller du sol, et sortit dans le froid libérateur de l'hiver.

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Il faisait beaucoup plus frais dans la tanière du guérisseur, et l'ambiance y était sereine. Installé dans un lit de fougère, Petit Corbeau ronflait, à mis chemin entre l'éveil et le sommeil. Un peu plus loin, Pétale d'Asphodèle farfouillait dans ses maigres réserves. Il  en extirpa diverses plantes : de la chlorophylle, de la tanaisie et une feuille de menthe, la première pour apaiser la gorge endolorie du chaton, la seconde pour stopper sa toux et la dernière pour lui déboucher le nez afin de l'aider à respirer. Il mâcha le tout, et y ajouta un soupçon de miel pour rendre le gout plus supportable pour le palais délicat du petit.
Petit Corbeau lui faisait de la peine, ainsi mal en point. D'habitude, le chaton sautillait partout. Il était tellement heureux de devenir apprenti ! Le guérisseur devrait le soigner au plus vite pour qu'il puisse enfin retrouver sa place.  
D'ailleurs, le chaton lui rapellait lui-même, au même âge, alors qu'il était constamment terrassé par la maladie et devait vivre avec le guérisseur. Il pouvait comprendre la détresse de l'enfant, alors que la gorge prend feu et que les poumons ne fonctionnent plus. Il ne lui souhaitait pas cette souffrance. Le guérisseur s'approcha du chaton et le maintint d'une patte alors qu'il faisait couler la mixture médicinale entre ses petits crocs. Petit Corbeau n'avait pas l'air vraiment ravi du gout, mais Pétale d'Asphodèle lui massa fermement la gorge pour la lui faire avaler. Après de longues secondes de galère, le noiraud vint finalement à bout de son remède.
Bien. C'était déjà ça : le remède devrait calmer son mal. Il faudrait voir comment son état évoluerait par la suite, et il lui donnerait des graines de pavots pour l'aider à s'endormir; cependant, Pétale d'Asphodèle avait besoin d'entendre le ressentit du chaton avant qu'il ne s'endorme complètement.

"Allez, reste avec moi, Petit Corbeau. Dis-moi un peu comment tu te sens."

Le guérisseur prononça ces mots le plus délicatement du monde, de la même manière qu'il se serait adresser à ses propres enfants –du moins s'il avait l'occasion de les côtoyer. Il caressait le pelage du petit avec son épaisse queue chocolat en panache, pour garder l'attention de l'enfant : il devait rester éveillé, pour le moment.

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Pétale d'Asphodèle

Petit Corbeau regarda le guérisseur un instant, l'air hébété, et réussit à lui miauler faiblement :

-Hai mal aux yeux ais à ha tête ais aux bentre. Suis fatigué.

La pauvre petite boule de poil n'arrivait même plus à parler correctement. Et son raisonnement était bien celui d'un enfant : une description peu précise. Pétale d'Asphodèle lui avait déjà donné le nécessaire pour ces douleurs-ci. Cependant, il percevait qu'il lui restait un problème, et de taille : la gorge et les bronches du petit étaient complètement prise par le mucus, d'ou sa voix. Le guérisseur connaissait bien ce problème : il avait passé toute sa jeunesse dans cette même tanière pris de crises de toux  insurmontables. En ce moment, il se rendait compte à quel point le petit lui rappelait lui-même : un grand chaton malade, dont le baptême avait été repoussé à cause d'un mal dévastateur. Heureusement, le guérisseur savait exactement comment traiter ce problème.
Il retourna Petit Corbeau sur le dos et posa sa patte sur sa cage thoracique. Avant de commencer la manœuvre, il eu à prévenir son patient :

"Je vais devoir te faire un massage pour évacuer tout ce qui te gêne la dedans. Ca risque de te faire un peu mal, mais après tu iras déjà beaucoup mieux et tu pourras dormir, d'accord ?"

L'enfant miaula faiblement. Pétale d'Asphodèle sentait qu'il serait courageux. Alors il commença à appuyer assez fortement  de ses pattes avant sur la cage de Petit Corbeau, en effectuant des mouvements circulaires. Son patient se tortillait, mécontent. Le guérisseur savait très bien que ces gestes n'avaient rien d'agréables, mais ils permettaient de décoller tout le mucus qui encombrait le chaton. Et après avoir reçu ce type de traitement des centaines de fois, Pétale d'Asphodèle n'avait aucunes chances de se tromper.  
Un fois le massage effectué, il retourna le petit sur le dos, qui se mit presque immédiatement à recracher ce qui lui encombrait la gorge. Le matou brun lui massa le dos, plus légèrement cette fois, pour l'aider à évacuer. Une fois cela accomplit, le chaton s'affaissa au sol, tout tremblant. Ce soin avait été éprouvant, mais il s'était averé util : déjà la respiration de Petit Corbeau semblait plus aisée, moins sifflante.
Le guérisseur s'allongea près de l'enfant pour le réconforter. Il lui nettoya le pelage doucement jusqu'à ce qu'il se calme en lui murmurant des paroles encourageantes - "C'est bien, tu es courageux.". Puis il se leva, et entrepris de débarasser la mousse du nid souillé. Il alla la jeter en-dehors de la tanière, et, lorsqu'il revint, Petit Corbeau avait sombré dans le sommeil avant même que le guérisseur eu pu lui administrer quelques graines de pavot.
Satisfait, Pétale d'Asphodèle s'assit et observa silencieusement le petit. De toute évidence, il ne souffrait pas du même mal qui atteignait le guérisseur. Cependant, savoir que quelqu'un pouvait ressentir la même chose que lui le rassurait d'une certaine façon, et il savait qu'il pourrait soigner efficacement le petit.

C'était réconfortant, de voir quelqu'un dans cette tanière glacée. En compagnie de Petit Corbeau, Songeur se sentait un peu moins seul. Il laissa son esprit vagabonder un peu. Est-ce qu'un jour il pourrait se sentir accompagné par ses enfants ? Même adoptés, les trois chatons de Passion Erratique comptaient énormément pour lui. Et si l'un d'eux devenait son apprenti ? Ne serait-ce pas merveilleux ? Le matou soupira. Cela n'avait pas de grande chances d'arriver. Quant à Petit Corbeau, il ne resterait pas avec le guérisseur, de toute évidence.
Il avait l'air tellement heureux à l'idée de devenir guerrier. Pétale d'Asphodèle lança un regard absent vers le camp vide et enneigé, se demandant s'il pourrait un jour trouver une réelle compagnie dans cette tanière isolée.

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Pétale d'Asphodèle

La fraîcheur de la tanière accueillit Pétale d'Asphodèle alors qu'il y pénétrait. Depuis quelques jours maintenant, Petit Corbeau habitait avec le guérisseur, et cela lui rendait moins pénible l'idée de devoir rentrer seul dans son nid. L'état du chaton s'était grandement amélioré : il ne toussait presque plus et avait à peine le nez qui coulait. Heureusement, d'ailleurs : Pétale d'Asphodèle avait utilisé ses dernières resserves pour soigner le petit. Il ne lui restait plus rien qui puisse servir à traiterles maladies de la saison froide, et même si l'hiver touchait à sa fin, le guérisseur avait comme un mauvais pressentiment. Il continuerait sa recherche de plantes plus tard. Pour l'instant, il avait à aller vérifier l'état de son patient.

Petit Corbeau était complètement éveillé. Son pelage était brillant et son regard vif. Il avait rapidement reprit du poil de la bête, et il semblait s'ennuyer. C'était compréhensible : il ne s'était pas levé depuis plusieurs jours. Après avoir vérifié l'état de sa respiration, le guérisseur lui fit donc une proposition.

"Que dirais-tu de sortir faire un petit tour ? Ca te feras du bien de te dégourdir les pattes. Le petit s'illumina et se leva rapidement au coté de Pétale d'Asphodèle. Il chancela un instant. On y va tout doux, pour l'instant, le repris le guérisseur. Si jamais tu te sens mal, dis le moi; on rentrera immédiatement."

Sur ces mots les deux comparses s'extirpèrent de la tanière de pierre. Le doux soleil de l'après-midi les accueillit, cassant le froid ambiant. Ils marchèrent ainsi autour du camp, lentement pour ne pas brusquer le chaton. Il semblait aux anges : les autres petits et apprentis venaient le saluer, lui demander de ses nouvelles, et Petit Corbeau s'empressait de discuter avec eux. Il faut dire que le chaton n'avait pas eu beaucoup de visites durant ces derniers jours : à part sa mère, personne ne devait l'approcher, mesure de quarantaine oblige.
Pétale d'Asphodèle observa le petit qui marchait à ses cotés. Depuis qu'il vivait avec lui, le guérisseur se sentait un peu moins seul. Quand il était réveillé, Songeur lui racontait des histoires pour l'apaiser, et le soigner était devenu une routine confortable qui l'éloignait de la pouponnière. Mais en le voyant ainsi heureux de pouvoir enfin sortir, une certaine mélancolie le prit. Bientôt le chaton quittera son nid et le guérisseur se retrouvera de nouveau seul avec ses problèmes.
Lorsque Petit Corbeau revint à lui, il repoussa ce petit pincement au cœur et fut vraiment heureux de le savoir guéri.

"Eh bien, tu en as, du succès ! Ronronna-t-il. Tu me sembles bien en forme. Je vais prévenir Etoile Azurée que tu es prêt à recevoir ton baptême."

Le chaton noir s'illumina à cette idée. Enfin, il allait pourvoir être sacré apprenti ! Cela rappela à Pétale d'Asphodèle sa propre convalescence, lorsqu'il était enfant. Seulement, son coeur était toujours resté près des plantes médicinales et de la tanière de roches. Durant un instant, le guérisseur crut que, peut-être, le chaton choisirait cette voie lui aussi. Mais Petit Corbeau avait un avenir de guerrier : il ne rendrait plus visite au guérisseur et s'éloignerait. C'était ce qu'il se passait toujours.