As the seasons

feat Promise

 La nuit était belle. Même plus que ça, elle était magnifique. L'obscure clarté venant des étoiles illuminait le camp. Un camp endormi. Et au milieu de ce camp, un chaton. De six lunes. En apparence. Parce qu'il est petit. Parce que sa taille n'est pas celle de son âge. Il a neuf lunes, réellement. Pas six, mais on lui en donne six. Et c'est loin de le déranger. À savoir, le sait-il réellement? Non, sûrement pas. Et puis, en quoi ça peu le déranger? Il était là. Juste immobile. Pas même une moustache bougeait. Il était là, immobile. Sans jamais remuer la queue, bougeait une patte ou remuer les moustaches. Le froid glacial de la nuit cinglait son pelage, mais il ne réagissait pas. Il aurait tout aussi bien pu se laisser mourir là, comme ça. Il ne réagirait pas assez tôt pour empêcher son cœur de cesser de battre à cause du froid imposant, qui gelait chacun de ses membres. Nuage Psychotique laissait au froid le temps de faire un carnage sur lui, parce qu'il observait la lune, haute dans le ciel. Envoûtante. Il était captivé par l'astre lunaire qui semblait en être satisfaite. Comme si elle était faite pour être observée avec une telle intensité. Mais était-ce seulement l'apprenti qui déraillait en s'imaginant que la Lune, si digne soit-elle, nécessitait que l'observe, parce qu'elle était si seule, entourée d'autant d'étoiles? Était-ce l'apprenti qui se disait des choses qui ne pouvaient être réelles? Peut-être. Assurément. Mais pas pour lui. Toutefois, il finit par se lever, comme si la Lune le lui avait ordonné et peut-être que pour lui, c'était le cas. Peut-être qu'il avait le sentiment que la Lune lui avait ordonné de le faire. Seulement, ça restait des suppositions. De simples et pures suppositions qui ne valaient guère. Nuage Psychotique marcha. Un pas après l'autre. Lentement. Doucement. Dans la nuit, ses yeux ambrés illuminaient. Dans la nuit, son pelage roux se distinguaient. Et sa démarche lente était étrange. Les chats ne marchaient pas ainsi, ils allaient plus vites. Pas une patte devant l'autre, de façon à ce qu'atteindre l'autre bout du camp prenne une éternité. Mais l'apprenti-ombre n'en faisait pas de cas. Il marchait comme lui le souhaitait. Puis, il se décida de courir. Il en avait envie. Ses envies étaient démesurés. Rien n'avait de sens. Une envie venait comme ça et il y cédait. Il pourrait tuer, par envie. Mais ce n'était pas important.

Ainsi, alors qu'il était au bout du camp, il attendit. La Lune était toujours là, le soleil, soumis, ne sortait jamais durant la nuit et les étoiles éclairaient. Lui, il attendait. Sans raison apparente. Il n'allait pas dans le repaire des apprentis. Il n'allait pas dans une tanière. Il restait à l'extérieur. Sans comprendre ce qu'il faisait ici. Sans comprendre pourquoi il n'était plus dans son Clan natal, mais sans en vouloir non plus à qui que ce soit si ce n'est la Vie. La Vie qui ne devrait pas exister. Qui devrait se soumettre à la mort comme le fait le soleil avec la Lune la nuit et la Lune avec le soleil le jour. La Vie qui était têtue, cruelle. Qui avait permis à tant de chats de voir le jour alors qu'elle aurait dû s'abstenir de faire quoi que ce soit. Il maudissait la vie. Mais pas comme les autres l'auraient fait. Pas avec autant d'ardeur. Il la maudissait mollement, oubliant l'instant d'après qu'il la détestait. Il ne comprenait juste pas pourquoi elle existait. Pourquoi tout existait. La Vie, la nature. La neige. Mais il ne cherchait pas plus à comprendre. Après tout, c'était comme ça. Seulement, la morte uniquement méritait d'être. De régner. L'apprenti ferma les yeux. Il ne réfléchissait pas. Laissait le temps passer sans plus de précaution et s'endormit. Brièvement. Vraiment pas longtemps. Parce que quelques minutes plus tard, il ouvrit difficilement ses paupières lourdes et regarda de nouveau le ciel. Toujours aussi noir, mais illuminé par les étoiles. Et par Lune. Nuage Psychotique dormait peu, comme en témoignait cette nuit glaciale. Et bougeait peu. Tout était là pour montrer que ce n'était pas le chat parfait, mais plutôt un chat qui sortait du cadre normal. Qui s'éloignait des sentiers battus. Parlant de sentir, alors que la Lune était toujours là, mais que le vent se réchauffait ne serait-ce qu'un peu, comparé à celui du milieu de la nuit, il se leva. Et marcha. Encore lentement. Mais hors du camp. Comme s'il fuyait les souvenirs. La raison de sa présence dans ce Clan. Est-ce qu'il s'en souvenait seulement?

Il marchait doucement, bravant la tempête qui se levait, le vent qui redevenait aussi glacial que durant la nuit, voir même plus. Les petits flocons de neiges virevoltaient dans l'air, comme s'ils entamaient une danse, un spectacle pour distraire les chats les observant. Un flocon s'échoua sur la truffe de Nuage Psychotique qui recula, la sensation était désagréable. Mais il continua son avancé par la suite, avant de s'immobiliser brusquement. Cette mélodie. Elle était là. Chaque note était comme une berceuse visant à apaiser le cœur peut-être inexistant d'un apprenti qui était lui. Il n'était pas n'importe qui non, il n'était que lui. Lui et encore lui. Il ne ressemblait à personne d'autre qu'à lui-même. Et la musique qui le charmait s'estompa finalement. Il reprit conscience du froid sur son pelage, de la neige qui tombait. Il continua son périple et marcha encore. Longuement. Il marchait très lentement de façon à ce que cela lui prenne beaucoup de temps à arriver à une destination inconnue, car il ne savait pas où il allait. Il n'avait pas de but précis. Toutefois, il finit par arriver quelque part. Devant une tanière sortie de terre. Haute. Bien plus haute et large que les tanières du camp. Et dans une matière étrange qu'il ne connaissait pas. Une matière qui l'intriguait. Il s'approcha doucement. Gracieusement. Il avait pénétré dans l'ouverture, sans gêne, sans crainte et avait avancé dans les pièces au sol bien lisse, luisant. Glissant. Il manqua de tomber plusieurs fois. Parcourant les pièces et finissant par s'installer quelque part, dans un endroit plus vaste que les autres. Avec un lustre effondré au milieu. Et il pencha la tête, en proie à la musique de nouveau. Mais elle fut courte cette fois-ci et il vit une chatte entrée dans la pièce. Gambader. Être joyeuse. Qu'était-ce la joie? Il ne le savait pas. Mais elle courrait, elle se laissait frôler le sol et les murs d'un beige doré délavé. Elle laissait la joie l'envahir et lui, il l'observait sans plus de discrétion. Sa queue bougea un instant, accrochant un objet et faisant du bruit. Il avait trahit sa présence. Et comme de fait, la nouvelle venue leva la tête et le regarda. Elle prononça son nom et recula un peu. De quelques pas, mais fut bloqué. Nuage Psychotique demeurait un long moment silencieux. Immobile. Sans remuer quoi que ce soit.

- Oui?

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