Je glissa la tête à l'extérieur du gîte des apprentis. Tous dormaient, ronflaient, rongés par la fatigue de leurs entraînements. Et puis il y avait moi. Le matou qui s’entraînait seulement quand les guerriers sans apprentis et avec un peu de temps libre lui proposait. Affecté par ces pensés, je sortis, sans un regard pour mes congénères de tanière. J'étais jaloux, oui, jaloux. Je passa devant la tanière des guerriers, et je pu me retenir de passer ma tête à l'intérieur. Mon père dormait au fond, la truffe enfouie sous les pattes. Je soupira. Je ne comprenais plus les histoires de ma famille. Et je ne les ai sûrement jamais comprises. Ce que je comprenais, c'était les mensonges que l'on m'a racontés toute mon enfance. Qu'est ce qui est vrai? Je l'ignore, mais si j'en viens à me demander quelle est la vérité, cela veut dire qu'il y à une part de faux dans tout ça. Je sortis, puis longea la pouponnière pour mettre mon nez à l'intérieur. Ma mère somnolait, la queue roulée autour de ses chatons, de mes sœurs. Je fronça les sourcils et disparu dans la forêt immédiatement. Je ne pouvais pas vraiment supporter le fait qu'elle passait tant de temps dans la pouponnière, sans même me regarder, porter attention à moi, m'entraîner...

Le vent fouetta mon visage, sans la protection de la barrière du camp. Je continua tout de même ma marche, allant là où mes pattes voulaient bien me mener. Je déboucha finalement, sans m'en rendre compte, dans le marécage. À croire que c'était le seul endroit où je pouvais arrêter de penser.
Je porta mon regard sur la surface de l'eau boueuse. J'y voyais mon reflet, baigné par la lumière blanche de la lune. Je caressa la surface délicatement avec mon coussinet; à peine si j'avais effleuré le liquide. Des ondes circulaires déformèrent mon miroir jusqu'à ce que je ne reconnaisse même plus mon beau visage. Je recommença ce jeu idiot à chaque fois que mon reflet redevenait clair et voyant. C'était idiot et enfantin, mais au moins j'arrêtais de penser.

Après de longues heures à rêvasser, à endormir mes pensées, j'entendis une branche craquer. Je leva la tête, intrigué. Le visage élancé et laid de Folie Noire sorti des ombres, montrant son corps mince et dépourvu de poils. Le matou était sale, plein de boue. Mes oreilles commencèrent à se plaquer sur mon crâne quand il s'approcha de moi. Je n'aimais pas ce chat. Je n'aimais pas les guerriers qui s'y prenait de haut avec moi. J'avais déjà assez de problème comme ça, et j'étais déjà le serviteur de Reine Elfique. Donc, non merci, j'avais déjà assez donné. Et puis, sa tête ne me disait rien de bon.

Il s'approcha de moi, et sans raison valable, il me poussa. Le vent plaidant pour lui, à eux deux, ils purent facilement me faire chanceler dans le marécage. L'eau me recouvra un moment avant que je prenne pied et que je lève la tête hors de l'eau sale. Le vent froid fouetta mon visage, gelant toute partie de mon corps humide. Je sortis de l'eau, m’empressai de me secouer et tenter de me sécher le plus vite possible avant que le vent froid me rende malade. Les yeux qu'il posait sur moi me firent serrer les dents.

« Oups, je suis désolée, je n'ai vraiment pas fait exprès incapable et inutile apprentis. »

Je me mordis la langue mille et une fois. Ne dit rien, ne dit rien, ne dit rien! Mais je suis un être orgueilleux qui déteste se faire marcher sur les pattes... Et en plus avec toute cette fatigue accumulée, je ne pu que lancer, les dents serrées pendant que je m'affairais à donner de grands coups sur ma poitrine blanche :

« Inutiles? Incapables? Je te signale que tu dormirais encore dans ta propre merde si nous ne nettoyions pas ta litière de chat galeux. »

Je me tournai vers lui, les yeux plissés et un air de défi dansant sur mon visage.

« D'ailleurs, qu'as-tu? Pourquoi viens-tu t'abaisser aussi bas, je veux dire, pousser les apprentis '' inutiles et incapables '' de son propre clan dans un marais... tu ne dois pas faire grand chose de ta vie! Ah! Mais si! Tu parles dans ta tête et tu laisses les autres nettoyer ta merde. »
Je retourna à mon séchage pendant que je le laissais ruminer seul. Ce guerrier ne m'avait jamais vraiment aimé, et c'était réciproque, je dois dire. Pourquoi ne pas lui poser la question, maintenant que nous disions les choses en toute franchise?

« Dis-moi. Pourquoi me détestes-tu à ce point? Il doit bien y avoir une raison. Aussi idiote soit-elle. »